Le regain d’appétit pour le risque plombe l’or. Il pourrait rester volatil à court terme, mais devrait néanmoins s’apprécier à moyen terme.
Joseph R. Biden Jr a été élu 46ème président des Etats-Unis. Reste que pour les marchés financiers, ‘peu importe le nom du vainqueur de la course à la Maison Blanche’, juge Alain Corbani, responsable pôle matières premières chez Finance SA et gérant du Fonds Global Gold and Precious. Pour lui, le fait que ni démocrates ni républicains n’aient obtenu le contrôle du Congrès américain (deux seconds tours des sénatoriales de l’Etat de Géorgie sont programmés pour le mois de janvier 2021) va de facto forcer la Fed à prendre des mesures de quantitative easing (rachats d’actifs massifs, NDLR) plus agressives afin de compenser un paquet fiscal (mesures de relance budgétaires, NDLR) bien inférieur aux montants faisant l’objet d’âpres négociations il y a encore quelques jours.
Car le risque sanitaire lié au Covid-19 reste omniprésent, au-delà de l’annonce de Pfizer ce lundi 9 novembre sur son candidat vaccin anti-coronavirus. ‘En septembre comme en novembre, les minutes de la Fed sont restées focalisées sur la crise sanitaire et sur les risques considérables pesant sur les perspectives économiques à moyen terme. Et de rappeler que dans ces conditions, le Comité prévoyait de maintenir une orientation accommodante de la politique monétaire’, souligne le gérant. D’où des pressions à venir persistantes sur le front des taux d’intérêt. Or, le métal jaune, qui ne verse pas de revenu, tend à évoluer à l’inverse des taux réels (les taux moins l’inflation), du fait d’un phénomène d’arbitrage.
« Sans le premier stimulus fiscal américain, le PIB du troisième trimestre 2020 aurait chuté de 6% au lieu de croître de 33%’, souligne Alain Corbani. La Fed était alors intervenue massivement en baissant ses taux directeurs de 1,5 point de pourcentage et en provoquant ainsi une hausse du cours de l’or de 30%. ‘Aujourd’hui, l’économie américaine compte 10 millions de chômeurs de plus qu’il y a un an. Les taux ont baissé fortement, mais en cas de nouvelle intervention ils peuvent davantage baisser. La taille du bilan de la Fed le permet puisqu’elle ne représente ‘que’ 36% du PIB national. Un tel scénario serait évidemment favorable aux marchés d’obligations (qui évoluent à l’inverse des taux, NDLR) mais aussi à l’or et bien sûr aux sociétés de mines d’or qui ont annoncé d’excellents résultats trimestriels’, relève le gérant.
A court terme, l’annonce spectaculaire de Pfizer sur son candidat vaccin provoque toutefois un net recul de l’or. Mais ‘si les excellentes nouvelles tant attendues sur le front de la production et distribution de vaccins pour lutter contre le virus Covid-19 auront forcément à court terme un impact négatif sur les prix des obligations (hausse des taux) et de l’or, il serait illusoire de croire que ces vaccins soient la panacée dans un univers de déséquilibres structurels massifs’, met en garde le gérant.
Que dit l’analyse technique ?
Le soudain retour de l’appétit pour le risque qui vient de propulser les indices actions vers des niveaux records agit défavorablement sur l’or. ‘Ce dernier évoluait depuis mi septembre dans un range (bandeau horizontal de fluctuation) : 1.863-1.928 dollars dont il était sorti par le haut en fin de semaine dernière. Il revient maintenant sur le bas du range’, note de son côté Daniel Cohen de Lara, président de l’Association française des analystes techniques (AFATE).
‘Tant que les indices demeureront aux niveaux actuels, il sera difficile pour l’or de progresser de manière notable. Il faudra plutôt surveiller la tenue du bas du range à 1.863 dollars. Son éventuelle rupture ouvrirait la voie vers 1.847 puis 1.815 dollars’, selon l’expert.
Source : Capital